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thierry billet

Les sénateurs veulent (encore) modifier la loi LITTORAL

13 Décembre 2016 , Rédigé par Thierry BILLET Publié dans #Environnement

Alors que l'équilibre trouve en 1986 a fait ses preuves, la droite senatori essaie une nouvelle fois de modifier la loi LITTORAL. LE MONDE s'en inquiète dans l'édition datée d'aujourdhui.

Les parlementaires tentent de remodeler la loi littoral
La majorité de droite est favorable à la " création de zones d'activités économiques " sur les côtes aujourd'hui protégées

Au sujet de l'avenir du littoral français, les parlementaires nagent en pleine contradiction. D'un côté, des députés s'efforcent de prendre en compte l'érosion côtière en marche - un irrésistible phénomène qui, par endroits, efface huit mètres de côte sableuse par an, avale les dunes, sape les falaises et va fatalement obliger certaines implantations à reculer. De l'autre, certains saisissent l'occasion pour tenter de rogner la loi littoral, qui limite les constructions nouvelles dans les communes côtières.
Mardi 31  janvier, l'Assemblée nationale doit examiner en deuxième lecture la proposition de loi sur " l'adaptation des territoires littoraux au changement climatique ", initialement déposée par les députés socialistes Chantal Berthelot (Guyane), Pascale Got (Gironde) et Bruno Le Roux, qui a depuis rejoint le gouvernement. Ce texte, technique, " ni de droite ni de gauche ", comme le rappelle Mme Got, veut fournir des outils juridiques aux élus locaux démunis face à l'effritement de leur rivage, qui menace le bâti en front de mer. Il propose - mais n'impose pas - de créer notamment des baux particuliers pour des durées données. Il ouvre aussi la voie à une indemnisation des occupants de bâtiments condamnés par les assauts de la houle et la montée du niveau de l'océan.


" Dent creuse "
Adoptée en  1986 à l'unanimité, la loi littoral vise essentiellement à protéger du mitage urbain et du bétonnage massif qui a sévi chez certains voisins européens les paysages et les écosystèmes des bords de mer et des grands lacs. Si elle concentre les attaques de certains élus, c'est qu'elle ne se contente pas de défendre rigoureusement une bande large de cent mètres le long du rivage : elle réglemente aussi les zones attenantes.
Ainsi, jusqu'à présent, il n'est pas permis de construire n'importe où sur la lande ou au-dessus d'une calanque hors d'une zone déjà urbanisée ou d'un hameau. Jusqu'à deux kilomètres environ à l'intérieur des terres, il est aussi interdit de combler une " dent creuse " - c'est-à-dire l'interstice compris entre des constructions déjà existantes, maisons ou bâtisses agricoles.
En première lecture, le 11  janvier, la majorité sénatoriale s'est appliquée à enfoncer des coins dans cette loi appréciée des Français. Ses membres y ont introduit suffisamment de dérogations pour vider de leur substance ces dispositions qui empêchent de densifier les côtes. Foin des défis posés par l'érosion, réduits à quelques brefs échanges : les parlementaires ont finalement adopté un amendement ouvrant généreusement les vannes à " la création de zones d'activités économiques " nouvelles, sans garde-fou.
Le sénateur Jérôme Bignon (LR) avait alors prévenu ses " collègues " qu'il se " désolidarisait " de cette initiative. En tant qu'ancien président de l'Agence des aires marines protégées, il ne pouvait pas contribuer à ouvrir la boîte de Pandore.


La réaction ne s'est pas fait attendre. Une pétition intitulée " Ne touchez pas à la loi littoral ! " a enregistré presque 150 000 signatures en quelques jours. Son auteur, Jean-Laurent Félizia (EELV), un jardinier paysagiste conseiller municipal du Lavandou (Var), n'a pas eu de mal à convaincre d'y joindre leurs noms Yann Arthus-Bertrand, Isabelle Autissier, Allain Bougrain-Dubourg, Nicolas Hulot, Corinne Lepage, quelques parlementaires européens et présidents d'associations de défense de l'environnement.


" Je ne suis pas surpris que des élus s'en prennent à la loi littoral, ce n'est pas la première fois, note M. Félizia. Mais là, c'est quand même un comble, alors que l'on cherche justement à établir un cordon sanitaire face à l'érosion ! Ils jouent aux apprentis sorciers face au changement climatique. "
La Fédération des parcs naturels régionaux a elle aussi envoyé un message à l'Assemblée nationale, lui demandant de revenir sur les modifications apportées par le Sénat, car celles-ci donnent " la possibilité de davantage urbaniser le littoral, fragilisant ainsi les équilibres écologiques, socio-économiques et paysagers de ces espaces sous pression ".
Alors que le temps presse pour les côtes les plus vulnérables, Pascale Got a opté pour la recherche de consensus. " Je veux bien faire une avancée sur les constructions en discontinuité pour les activités agricoles, forestières ou ostréicoles afin de faciliter l'installation de jeunes exploitants ; voyons aussi si on peut s'entendre sur la définition de «dents creuses», concède la députée de Gironde. Mais rien de plus. "


" Briser un tabou "
Les députés seront-ils sensibles à ces concessions et aux appels du public ? Lors de la réunion de la commission du développement durable, le 25  janvier, certains à droite ont repris à leur compte les arguments de leurs homologues du Sénat, qui " ont su briser un tabou en revenant sur les contraintes de la loi littoral ", selon Guillaume Chevrollier (LR, Mayenne).


" Il y a une application obsolète " d'un texte vieux de trente ans, sujet à interprétation de la part des juges et qui aurait besoin " non pas d'une remise en cause mais d'une adaptation ", a défendu en substance Jean-Marie Sermier (LR, Jura). Ce dernier a demandé par la même occasion de revisiter la toute récente loi montagne, adoptée en décembre  2016.
La fin de la législature approchant, si les parlementaires se mettent d'accord lors du nouvel examen du texte par le Sénat, prévu le 13 février, la proposition de loi sera adoptée. Dans le cas contraire, Mme Got met en garde les élus tentés par un blocage : " Ils prennent la responsabilité de pénaliser les maires qui attendent des réponses et les propriétaires qui sont en train de perdre leurs biens. "
Martine Valo


 

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