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thierry billet

Qualité de l'air à ANNECY, mon analyse

23 Mai 2014 , Rédigé par Thierry BILLET

La publication par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en mai 2014 d'un tableau mondial des pollutions de l'air en 2011 pour les poussières les plus fines de taille inférieure à 2,5 microns (PM 2,5) dans lequel ANNECY semble particulièrement polluée (2ème ville la plus polluée en France) a suscité des inquiétudes légitimes.

Cette forte émotion s'explique car ce chiffre apparaît en décalage avec les dépassements des valeurs limites de pollution qui concernent d'autres secteurs géographiques qu'ANNECY au titre de l'indice de qualité de l'air (cf. les épisodes de dépassement des valeurs limites dans les grandes zones urbaines au plan national qui ont épargné ANNECY jusqu'à présent).

C'est donc un coup de tonnerre qui a bien entendu interpellé tous les Annéciens.

J'ai donc essayé de comprendre ce qui explique ce « classement » dont nous n'avions absolument aucune connaissance jusqu'alors puisqu'aucune alerte des pouvoirs publics sur ces PM 2,5 ne nous avait été délivrée.

ANNECY est membre fondateur de l' association de l'Air de l'Ain et des 2 Savoie, intégré aujourd'hui à Air Rhône Alpes qui est la structure chargée des mesures de qualité de l'air dans notre région.

ANNECY bénéficie aujourd'hui de trois stations de mesure à Loverchy en bordure de l'avenue du Rhône, à Novel et boulevard de la Rocade.

Ces trois stations mesurent les polluants (Ozone, PM10, SO2, NO2) qui entrent dans le calcul de l'indice de qualité de l'air, l'indice ATMO qui donne lieu à des affichages réguliers sur les panneaux d'information électriques de la Ville.

Dans cet indice officiel, sont pris en compte le dioxyde de soufre, le dioxyde d'azote, l'ozone, et les poussières fines de diamètre inférieur à 10 microns (PM10).

Dans cet indice, ne sont pas pris en considération spécifiquement les poussières fines de moins de 2,5 microns (PM 2,5) qui sont intégrées aux PM 10.

Sur les PM 10 et à partir des mêmes sources que celles de l'OMS de mai 2014 (statistiques AIRBASE accessibles sur internet), le Monde et la Vie ont publié une carte de France de la pollution où ANNECY apparaît dans la tranche la plus nombreuse des villes françaises comprises entre 20 à 29 microgrammes de MP 10 en moyenne annuelle comme SAINT-ETIENNE, TOULOUSE, GRENOBLE ou PAU.

Alors que LYON, PARIS, MARSEILLE, NICE étaient comprises en 2011 entre 30 et 49 microgrammes par m3 d'air.

Sur les PM 10, il existe une réglementation spécifique qui notamment crée une limite de nombre de jours où la pollution dépasse 50 microgrammes de PM 10 (35 jours).

Sur les PM 2,5, il n'existe qu'une valeur limite annuelle qui sera de 25 microgrammes en 2015.

Il n'y a donc jamais d'alerte en FRANCE sur les PM 2.5 que l'on a donc tendance à négliger. D'autant qu'ANNECY a toujours été en dessous de ce seuil de 25 microgrammes annuel.

En 2011, année retenue par l'OMS car c'est l'année où elle pouvait disposer de données annuelles sur toute la planète, ANNECY était en moyenne à 21 microgrammes de PM 2,5 le pire résultat annuel depuis de longues années conséquence de périodes hivernales anticycloniques jamais renouvelées en janvier (37 microgrammes), février (44), mars (37) et novembre 2011 (39).

En 2012 le « pire » mois affiche 27 microgrammes en février.

En 2013, 33 microgrammes en décembre.

Nous sommes donc en présence d'un polluant (PM 2,5) à propos duquel la Ville est en deçà de la valeur limite fixée par la loi française. Cette concentration moyenne en 2011 est la conséquence d'une météo exceptionnelle au cours de  l'hiver 2010-2011, avec de mauvaises conditions de dispersion de polluants.

Il aurait été différent si l'OMS avait pris en considération les années 2012 ou 2013.

Tous ces chiffres sont disponibles sur le site d'Air Rhône Alpes en accès libre et direct en sélectionnant ANNECY et les PM 2,5. Je vous y renvoie.

Il faut bien comprendre pourquoi l'OMS a choisi ce polluant spécifique alors que la FRANCE prend en considération un bouquet de polluants dans lequel les PM 2,5 ne sont pas prises en considération spécifiquement et que les valeurs limites sur les PM 2,5 sont bien moins contraignantes et précises que celles relatives au PM 10.

Pour l'OMS, ces poussières très fines sont particulièrement dangereuses du point de vue du cancer et des maladies respiratoires dans la mesure où ces particules pénètrent au plus profond dans les alvéoles pulmonaires et créent un risque particulier parfaitement identifié.

D'où la décision parfaitement légitime de l'OMS de mettre l'accent sur ces poussières ultra fines sur le plan de la santé publique.

L'OMS a publié ses « lignes directrices OMS relatives à la qualité de l'air » téléchargeables sur son site.

L'OMS y fixe une « valeur indicative à long terme » de 10 microgrammes/m3 en moyenne annuelle.

C'est donc cet objectif indicatif correspondant à l'estimation épidémiologique d'une innocuité que nous devons nous fixer, et nous pouvons y parvenir compte-tenu de nos résultats des années 2012 et 2013 en agissant sur les trois sources d'émission des poussières fines : habitat, industrie et transport.

La difficulté particulière de ce dossier de la qualité de l'air est qu'il ne peut être résolu seulement au niveau municipal à la différence de la qualité de l'eau du lac qui relève de la seule volonté locale.

Les mesures protectrices de la santé publique auraient dû être prises au plan national sur la question du diesel par exemple, totalement évincée par les gouvernements de droite comme de gauche. Il n'y a pas de barrière possible pour protéger la qualité de l'air à ANNECY. Les chiffres annéciens sont ceux de son bassin de vie...

Dans ce cadre juridique insuffisant, la Ville et l'Agglomération doivent néanmoins agir. Les enjeux de santé publique dépassent tous les clivages politiciens : il nous revient de faire ici et maintenant tout ce qu'il est possible de faire pour améliorer la qualité de l'air.

Pour aller vite, l'OMS nous dit qu'elle se moque des épisodes de dépassement des valeurs limites sur les différents polluants. L'OMS considère que s'agissant de maladies chroniques, ce ne sont pas les "pointes" qui sont pertinentes (même si elles peuvent être gênantes pour les personnes fragiles), mais la quantité de polluant respirée sur toute l'année. Les pointes peuvent être responsables de problèmes aigüs de santé pour certaines personnes; mais c'est la quantité de polluant respiré au long cours qui pose problème de santé publique. Là encore, il s'agit d'un changement radical d'approche par rapport à la législation nationale qui a tendance à considérer que tout va bien tant qu'on respecte les valeurs limites... L'OMS nous dit "Non, c'est la dose annuelle qui compte, même si vous ne dépassez pas les valeurs limites."

Cela signifie très clairement que les annéciens et ceux qui nous rendent visite doivent être incités voir contraints à réduire leurs émissions de poussières fines ; ce qui veut dire réduire le trafic automobile et en particulier celui des véhicules les plus polluants au diesel, développer les modes doux de transports, etc.

Ce classement doit être le point d'un nouveau départ en matière de piétonnisation, de réduction de la circulation automobile et de politique active de stationnement.Même si nous dépendons des décisions de l'Etat et des autres collectivités territoriales, il nous faut tout faire pour atteindre la cible des 10 microgrammes de PM 2.5 en moyenne annuelle. Nous ne pouvons pas tout faire, mais nous devons faire ce qui est possible pour nous dans nos domaines de compétence.

La réunion publique du 2 juin 2014 à 18 heures 30 à la Salle des Allobroges avec la participation de Monsieur Didier CHAPUIS de l'Air Rhône Alpes doit donner le coup d'envoi de la prise des décisions nécessaires pour atteindre l'excellence souhaitée par l'OMS à 10 microgrammes/m3 en moyenne annuelle d'ici la fin du mandat.

 

 

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