Les délinquants de l'environnement mieux traités pénalement que ses défenseurs
17 Décembre 2022 , Rédigé par Thierry BILLET
Le Parquet Général près de la Cour de cassation vient de publier un rapport sur le traitement pénal des infractions au droit de l'environnement. Alors que le souci de prendre soin de la Nature se généralise année après année, le rapport dresse un état des lieux résumé ainsi : "Actuellement, les réponses judiciaires ne sont pas satisfaisantes en raison de leur manque de réactivité et de fermeté". Le contentieux de l'environnement ne représente que "entre 0,5 et 1% des affaires pénales traitées, un chiffre en baisse continue ces dernières années, alors que les enjeux et les risques en lien avec l'environnement sont majeurs et que les préoccupations des citoyens qui en résultent sont légitimes". Même si 58 % de ces affaires sont poursuivables car leur auteur est identifié, le taux de classement sans suite et d'abandon des poursuites est 53%, bien plus que dans les autres domaines du droit pénal. Autrement dit, les Procureurs de la république jettent à la poubelle plus de la moitié du lilliputien contentieux de l'environnement même quand le délinquant est identifié. Plus fort, 75% des délits environnementaux qui devraient être jugés au Tribunal correctionnel se terminent par de simples rappels à la Loi et des classements sans suite. Les jugements correctionnels sont de ce fait de plus en plus rares (5,4% des délits environnementaux) et avec une chute de 10 points en 2022 par rapport à 2005. Plus la population est sensible à l'environnement et moins les délits le concernant sont poursuivis.
Et l'infime proportion qui est jugée donne lieu à "8 fois plus de dispenses de peine" que dans les autres domaines du droit pénal. La Cour de cassation souligne enfin que les peines d'amende qui représentent 71% des sanctions baissent régulièrement.
Dit plus simplement : les délinquants de l'environnement ne risquent en réalité RIEN. Et ils le savent très bien. Malgré les efforts de quelques substituts du procureur pour améliorer la situation, les poursuites sont rarissimes et les sanctions manquent de la plus élémentaire dissuasion. L'exemple annécien de TUMBACH/TRIGENIUM est symptomatique : une sanction dont on se félicite après tant d'années d'impunité, mais un quantum d'amende tellement faible prononcé par le Tribunal correctionnel d'ANNECY qu'il constitue pour le pollueur un investissement bien plus rentable que d'avoir mis en place les mesures de prévention qui auraient empêché le délit. Un calcul cynique, mais d'une efficacité redoutable, permet aux actionnaires des délinquants de prouver qu'il vaut mieux être en infraction que de régulariser la situation puisqu'on ne risque en réalité qu'une amende symbolique.
La Cour de cassation propose plusieurs recommandations techniques pour tenter d'améliorer la situation, à commencer par la formation des magistrats. C'est son rôle de conseil technique du Gouvernement. Mais il faudra sans aucun doute attendre une campagne d'opinion autour d'un "#Me-environnement" pour que ces infractions ne soient plus mises sous le tapis comme l'a fait "#Metoo" pour les violences faites aux femmes. Remarquons à l'inverse que les Parquets sont beaucoup plus réactifs lorsqu'il s'agit de poursuivre les militants écologistes faucheurs d'OGM et autres opposants aux mégabassines, devenus "écoterroristes" selon les ministres DARMANIN ou DUPONT-MORETTI et fréquemment condamnés à de la prison. Les délinquants de l'environnement sont mieux traités pénalement que ses protecteurs. Merci au Parquet général de la Cour de cassation d'avoir fourni avec son rapport les chiffres qui le prouvent.
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