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thierry billet

Ne pas perdre sa vie à la gagner

19 Janvier 2024 , Rédigé par Thierry BILLET

Dans les années 1970, la CFDT avait axé sa dénonciation du travail à la chaîne par ce slogan magnifique : ne pas perdre sa vie à la gagner. Aujourd'hui que les témoignages des agents du service public territorial annécien reviennent inlassablement sur leurs difficultés à travailler dans l'environnement pathogène créé par les LARDORG, cette image saisissante garde la même force, mais la cause n'en est plus le travail déshumanisé du taylorisme chasseur de temps morts dans l'industrie. La cause en est la perte de sens du travail intellectuel qui est demandé aux agents du service public. C'est à dire, pour être plus précis, la perte du sens de leur action quotidienne pour les habitants de notre territoire.

Quand les conseils municipaux ou les conseils communautaires deviennent des foires d'empoigne, que la majorité municipale se réunit sans l'équipe de direction par suspicion et pour tenter de moins étaler ses dissensions, que les ordres et les contre-ordres deviennent la règle, que les dossiers sont préparés dans l'opacité  (cf. l'exemple de la transformation de l'office du tourisme en société d'économie mixte) et que plus personne ne peut faire confiance à personne parce que des entretiens confidentiels peuvent être utilisés par la personne qui est l'objet de ces entretiens. Alors le travail devient pathogène.

Entendons nous bien, on ne travaille jamais dans un monde de bisounours. Le travail peut être facteur de stress, de difficultés, d'échecs. La municipalité de JLR après la fusion n'était pas un havre de paix sans désaccords et sans débats. Le bureau du GRAND ANNECY n'était pas une chambre d'enregistrements sans échanges rugueux et sans arbitrages politiques. 

Les fonctionnaires territoriaux n'ignorent rien de cela. Leur loyauté ne vaut pas fidélité aveugle. Pour que le travail les rende malades, ce n'est pas le débat démocratique qui en est le vecteur. C'est le fait qu'ils n'ont plus confiance dans le dévouement de leurs élus en faveur du bien commun. C'est que derrière chaque décision, ils en soient conduits à se demander si il n'y a pas un intérêt caché de tel ou tel élu en faveur de telle ou telle solution. C'est ici que les conflits d'intérêts répétés des LARDORG depuis 2020 contribuent aux risques psycho-sociaux des agents. Derrière chaque décision, la question se pose pour les agents non plus de l'intérêt général mais des intérêts particuliers. Ainsi Mme LAFARIE continue de signer des arrêtés sur la piétonnisation de l'hyper centre-ville pour y développer à son aise son business de livraison à vélo ou celui de ses anciens associés; sans que le Maire ne réagisse. 

L'exportation dans le service public de normes de performance issues du secteur privé a banalisé des attitudes perverses d'élus qui veulent y implanter le mode de fonctionnement pathogène du privé : Baissez la tête et travaillez de plus en plus vite, sans craindre les annulations de dernière minute, les propos blessants, les remises en cause personnelles, la remise en cause de votre technicité.

Ce n'est que quand  l'estime de soi se rebelle enfin que l'arrêt maladie devient la seule issue pour tenter de prendre le temps de réfléchir et de se rendre compte qu'on n'est pas nul; mais que c'est le travail qui a rendu malade. Que ce n'est pas en serrant les dents chaque matin en allant au travail qu'on affirme sa force de caractère ou son sens du devoir. Dans ce mode de fonctionnement, l'individualisme est la règle de base, et la capacité à récompenser les moutons et les arrivistes du moment une nécessité. Mais même les plus serviles ne seront jamais à l'abri de la disgrâce ou de leur conscience. 

P... 3 ans 

PS : pour une analyse plus complète : "le travail à vif" Thomas PERILLEUX  et l'incontournable "Souffrance en France" de Christophe DEJOURS

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