La catastrophe qui frappe le Japon me rappelle ma première manifestation
antinucléaire en 1976 à PENLY en Seine Maritime. En 1979, sortait le film "le syndrome chinois" :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Syndrome_chinois
Depuis cette date, malgré toutes les alertes, la FRANCE continue son cavalier seul
sur le nucléaire, sans débat démocratique...
Actifs aujourd'hui ou radioactifs demain. Peut-être que demain est
aujourd'hui...
Voici le point de vue de la CRIIRAD ce 14 mars.
La CRIIRAD dénonce la sous-évaluation de la gravité des accidents survenus sur la centrale nucléaire de
Fukushima Daiichi et le manque crucial d’information tant sur les quantités de radioactivité rejetées depuis vendredi que sur les niveaux de
contamination de l’air. Faute de ces données, il est impossible de se prononcer sur les niveaux de risques radiologiques. Les rares chiffres disponibles empêchent en tout cas de qualifier les
rejets de « mineurs » (niveau 4 dans l’échelle INES) ou de « faibles » (déclaration télévisée de Mme Kosciusko-Morizet dimanche matin).
Un classement prématuré
Samedi 12 mars, les autorités japonaises ont classé au niveau 4 de l’échelle INES l’accident survenu sur le
réacteur n°1 de la centrale de Fukushima Daiichi alors que l’accident était encore – est toujours – en devenir et que plusieurs autres réacteurs étaient en situation d’urgence radiologique. Les
opérateurs de la centrale sont toujours en train de s’exposer à des niveaux d’irradiation très élevés pour éviter que la défaillance des systèmes de refroidissement des réacteurs n°1, 2 et 3 ne
se transforme en catastrophe nucléaire. Des mesures extrêmes ont été prises pour refroidir à tout prix les réacteurs (notamment l’injection d’eau de mer en dépit des risques
associés).
Le classement au niveau 4 a été enregistré sans correctif par l’AIEA. A notre connaissance, à ce jour, aucune
autorité de sûreté nucléaire ne l’a remis en question.
Rappelons que l’échelle dite INES (International Nuclear and radiological Event Scale) classe les accidents nucléaires en fonction de leurs conséquences dans le site et à l’extérieur du site.
Concernant les conséquences à l’intérieur du site, le niveau 4 correspond à un « endommagement
important » du cœur ou des barrières radiologiques ; dès lors que l’endommagement est « grave », le classement passe aux niveaux 5, 6 ou 7 en fonction de l’importance des rejets de radioactivité à l’extérieur de
l’installation, importance qui conditionne évidemment le niveau de risque d’exposition de la population :
-
Le niveau 4 correspond à un rejet mineur de radioactivité dans l’environnement ;
-
Le niveau 5 à un rejet
limité susceptible d’entraîner l’application partielle de contre-mesures prévues ;
-
Le niveau 6 à un rejet
important susceptible d’exiger l’application intégrale des contre-mesures prévues ;
-
Le niveau 7 à un rejet majeur avec
effet considérable sur la santé et l’environnement :
A l’appui du classement au niveau 4 de l’échelle INES (endommagement important,
mais pas grave, du cœur des réacteurs et rejets mineurs de radioactivité), ni les autorités japonaises, ni l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) n’ont publié de chiffres : ni
sur l’ordre de grandeur des rejets, ni sur leur composition isotopique (nature et proportion des radionucléides présents qui déterminent la radiotoxicité des émissions radioactives) ni sur les
niveaux de contamination de l’air à différentes distances de l’installation.
Tout aussi surprenantes sont les déclarations télévisées de la ministre de l’Ecologie qui a qualifié dimanche
matin les rejets radioactifs de « faibles », alors même qu’elle reconnaissait ne disposer d’aucun
chiffre. Cette qualification se fondait-elle sur l’évaluation des spécialistes de l’IRSN, de l’ASN et d’AREVA qu’elle avait réunis auparavant pour faire le point sur l’accident ? Il serait
intéressant de savoir si la minimisation est imputable aux experts officiels (comme en 1986) ou à l’échelon politique.
Selon la CRIIRAD les rejets ne sont ni
« mineurs », ni « faibles »
Sur la base des trop rares mesures disponibles, la CRIIRAD réfute formellement ce
classement.
Samedi 12 mars, les débits de dose auraient en effet atteint 1,5
mSv/h (milllisievert par heure) aux abords immédiats de la centrale, avant de décroître après les opérations de décompression du réacteur, c’est-à-dire après le rejet de
radioactivité dans l’atmosphère. Précisons qu’une valeur de 1,5 mSv par HEURE est de l’ordre de 10 000 fois supérieure au niveau ambiant normal et que la limite de dose réglementaire maximum admissible pour la population est de 1 mSv
par AN (de 20 mSv/an pour les travailleurs). Ces niveaux d’irradiation indiquent que les rejets n’ont rien de
« faibles » ou de « mineurs ». Une valeur de 100 µSv/h aurait été relevée dimanche par des journalistes à 2 km de l’installation. Si ce chiffre est avéré, il traduit la
persistance et l’importance des rejets dans l’environnement.
Un terrible manque de
transparence
Si les autorités affirment que les rejets
sont mineurs ou faibles, elles doivent le justifier sur la base d’éléments chiffrés, objectifs et vérifiables.
La CRIIRAD demande que soient publiées les évaluations de la quantité totale de radioactivité rejetée par chacun
des réacteurs accidentés ainsi que la composition isotopique des rejets. La CRIIRAD demande également la publication des niveaux de contamination de l’air : cartographie des activités volumiques (Bq/m3) pour les radionucléides clefs en fonction de la distance et du
temps. Il importe de déterminer l’intensité et les déplacements des masses d’airs contaminées. Les informations disponibles suggèrent en effet que les rejets radioactifs de la centrale de
Fukishima Daiichi ont atteint hier la centrale d’Onagawa située à 110-120 km au nord.
Evolutions météorologiques
préoccupantes
Il importe de souligner que plusieurs services météorologiques ont annoncé dimanche que les conditions
météorologiques - qui étaient plutôt favorables vendredi et samedi (vents d’ouest) – allaient s’inverser, avec des vents qui devraient désormais souffler vers l’intérieur des terres. Des pluies
seraient également annoncées ce qui conduit, en cas de contamination de l’air, à intensifier les dépôts au sol. Dans un communiqué du 13 mars, l’AIEA annonce au contraire que les vents
souffleront vers le nord-est, éloignant les rejets radioactifs des côtes japonaises. « In partnership with the World Meteorological Organization, the IAEA is providing its member states with weather forecasts for the affected
areas in Japan. The latest predictions have indicated winds moving to the Northeast, away from Japanese coast over the next three days.” L’AIEA n’a pas modifié cette information dans ses communiqués les plus récents. S’agit-il d’une version modifiée de
l’anticyclone censé protéger la France en 1986 ?
Ces incertitudes doivent absolument être levées. Pour assurer au mieux la protection de la population, ou
plutôt pour limiter au maximum son exposition, il est essentiel de disposer d’informations fiables et en temps réel sur les activités rejetées, sur la vitesse et la direction des vents, sur
l’évolution de l’activité de l’air et des dépôts au sol.
Si les informations sur les ordres de grandeur des activités, des concentrations et
des doses ne sont pas publiées pendant la phase de crise, il y a fort à craindre qu’il sera très difficile d’établir après coup la réalité des niveaux d’exposition.