Espérance de vie : le grand ralentissement
Le débat sur la réforme des retraites apparaît à ce point technique et s'appuie sur de telles idées reçues qu'on a du mal à se faire une idée éclairée. Retour sur une des justifications du report de l'âge de la retraite : l'espérance de vie qui augmenterait; ce qui n'est plus le cas selon l'excellent "ALTERNATIVES ÉCONOMIQUES"
« Tout le monde comprend bien que quand on vit plus longtemps il faut travailler plus longtemps. Certains sont en grève parce qu’ils ne comprennent pas tout », a déclaré le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer, le 2 décembre dernier sur RTL. Les dernières réformes des retraites prévoient d’ailleurs un allongement des durées de cotisation nécessaires pour obtenir une retraite à taux plein jusqu’en 2025, allongement basé sur les projections d’évolution de l’espérance de vie du scénario démographique central de l’Insee.
Or, ce que l’on constate depuis 2015 défie ce scénario : l’évolution effective de l’espérance de vie à 60 ans (en trait rouge épais sur le graphique) se situe très en dessous de ce scénario central, pour se rapprocher voire, dans le cas des femmes, passer sous le scénario bas de l’Insee. Autrement dit, l’espérance de vie à 60 ans a quasiment cessé de progresser.
Espérance de vie : le grand ralentissement
" Tout le monde comprend bien que quand on vit plus longtemps il faut travailler plus longtemps. Certains sont en grève parce qu'ils ne comprennent pas tout ", a déclaré le ministre de l'Educati...
https://www.alternatives-economiques.fr/esperance-de-vie-grand-ralentissement/00091181
ET SI L’ORDINATEUR REMPLAÇAIT LE JUGE ?
Alors que tout est fait depuis Nicolas SARKOZY pour éloigner géographiquement et physiquement le juge du justiciable avec un usage immodéré des outils numériques et la fermeture des juridictions de proximité au détriment des plus modestes; l'étape suivante sera de remplacer le juge par un logiciel. D'où l'intérêt de cette conférence de l'Université SAVOIE MONT-BLANC.
ET SI L’ORDINATEUR REMPLAÇAIT LE JUGE ?
Motarahe FATHISALOUT-BOLLON & Vincent RIVOLLIER
MAITRES DE CONFÉRENCES -Centre de Recherche en Droit Antoine Favre (CRDAF) -Faculté de droit de l’USMB
JEUDI 9 JANVIER 2020 | 18H | LA TURBINE SCIENCES
L’analyse automatisée des décisions de justice, les barèmes et la standardisation de la justice conduisent de nombreuses entreprises à proposer des outils de « justice prédictive ». Ainsi par exemple, aux États-Unis, une entreprise prétend calculer le risque de récidive, en vue de déterminer la peine d’emprisonnement. En France, une entreprise indique, à l’avance, le montant d’une indemnisation espérée en cas d’accident corporel. Ces outils ambitionnent de prévoir le résultat d’un procès ; ils s’appuient sur un calcul de probabilité à partir des décisions de justice rendues précédemment, en pariant sur le fait que le juge aura tendance à répéter ses propres décisions. Alors, si un algorithme peut prédire la solution du litige, pourquoi ne pas remplacer le juge par une machine ? Après une analyse sur les avancées technologiques en la matière, on s’interrogera sur leur potentiel mais aussi sur les risques et leurs limites. Une justice «robotisée» n’est-elle, finalement pas, synonyme d’une justice inhumaine ?
Bonne nouvelle 2020, les Français de moins en moins racistes.
Dans ALTERNATIVES ÉCONOMIQUES, Louis MAURIN, Directeur de l’Observatoire des inégalités, met en perspective les études d'opinion concernant le racisme.
Avec la croissance du vote F HAINE, les Français sont-ils devenus racistes ? Ce n’est pas ce que nous disent les enquêtes sur les valeurs, répond Louis MAURIN avec force tableaux que vous trouverez ici:
En 2018, les trois quarts estimaient « qu’une lutte vigoureuse contre le racisme est nécessaire en France », selon la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Seuls 7 % « pas du tout ».Avec 58 %, la part de ceux qui ne s’estiment « pas du tout racistes » est à un niveau jamais atteint dans l’enquête menée chaque année par la CNCDH, deux fois plus qu’en 2000. Selon la même enquête, 34 % estiment que « les races humaines n’existent pas » et 56 % que « toutes les races se valent ». Ils ne sont que 8 % à estimer que certaines races sont supérieures à d’autres.
Trop d’immigrés en France ?
Pensez-vous qu’il y a trop d’immigrés en France ? Une seule enquête permet de voir comment évoluent sur le temps long les réponses à cette question : il s’agit d’un sondage réalisé depuis la fin des années 1980 par la Sofres. Elle montre que depuis cette période, la part de ceux qui estiment qu’il y a « trop d’immigrés » tend à diminuer : elle est de 44 % en 2019, contre 65 % trente ans auparavant.
72 % des Français estiment que l’immigration est une source d’enrichissement culturel.
Pas davantage d’actes à caractère raciste
Le nombre total d’actes à caractère raciste a augmenté entre le milieu des années 1990 et le milieu des années 2000, passant d’environ 500 à 1 500 chaque année. Depuis, il oscille autour de ce niveau et a diminué à partir de 2016.
FIER D'ETRE MEMBRE DU 1% POUR LA PLANÉTE
Rencontres Associations et Philanthropes 2019 - Place aux associations ! Version courte
A quoi sert le 1% for the Planet ? Découvrez un extrait des témoignages des associations qui ont pitché lors des Rencontres Associations et Philanthropes 2019.
Espace citoyen, le lieu d'une controverse positive
"Une controverse est une discussion argumentée, engendrée par l'expression d'une différence d'opinion ou d'une critique quant à un problème, un phénomène ou un état de choses." nous explique WIKIPEDIA. C'est le terme qui m'est venu en lisant les contributions de l'Espace citoyen (conseil de développement) du GRAND ANNECY; cette institution appelée par la Loi à donner des avis sur les politiques publiques de l'agglomération; et qu'il ne faut pas confondre avec "l'observatoire citoyen" composé d'habitants tirés au sort pour suivre l'avancée du projet de territoire du GRAND ANNECY.
L'espace citoyen est composé de citoyens volontaires s'inscrivant dans la durée pour travailler globalement sur le sujets qui animent le territoire, qu'il soit saisi pour avis par les élus ou qu'il s'auto saisisse.
Qu'il s'agisse de l'avis rendu sur "le plan de déplacements urbains", des propositions sur "Tous en selle" (de vélo) ou du projet de contribution pour "accompagner les changements de comportements vers les transports collectifs et les modes doux", chaque document est le fruit d'un travail collectif qui rappelle l'existant, fixe les enjeux et donne un avis éclairé sur les documents soumis au débat démocratique.
L'une des prochaines études sera celle du projet de plan climat air énergie par un groupe de travail d'une vingtaine de membres.
Chacun peut s'inscrire pour participer à ces ateliers, à titre individuel ou au titre d'une association ou d'une institution. Le lien est ci-dessous...
Moins d'eau, plus d'habitants
En matière de gestion de l'eau, la nouveauté en HAUTE SAVOIE est que les élus commencent à intégrer que nous avons des problèmes de ressource, alors même que nous bénéficions/subissons la plus forte croissance démographique en FRANCE. Cette équation : moins d'eau, plus d'habitants nécessite une adaptation rapide de la politique de gestion dans le nouveau contrat de bassin en cours de finalisation entre l'agence de l'eau et le SILA pour 2020/2026.
Dès lors la question de l'infiltration, du maintien de l'eau de pluie sur le territoire et donc de la désimperméabilisation est stratégique. Le contrat de bassin prévoit ainsi la désimperméabilisation de 5 hectares sur le territoire d'ANNECY. Et on va commencer par les cours d'école pour y installer de plus des arbres de haut jet. Tandis que le prochain plan local d'urbanisme intercommunal devra clairement interdire le rejet des eaux pluviales dans des tuyaux qui accélèrent le débit de l'eau et contribuent aux épisodes de crues en aval.
"Sortir de la croissance" Eloi LAURENT
Ce livre aura été un de mes derniers coups de coeur de 2019 : si la critique de la sacralisation de l'indice "produit intérieur brut" est déjà ancienne, Eloi LAURENT montre avec pédagogie comment cet indice ne permet absolument pas de mener des politiques conformes à l'intérêt général tant en matière sociale qu'en matière climatique. "SORTIR DE LA CROISSANCE" devrait être sur vos tables de chevet en 2020. Voici un entretien sur MEDIAPART qui devrait vous mettre les neurones en appétit...
"Éloi Laurent est économiste senior à l’OFCE, professeur à Sciences-Po et à Stanford, aux États-Unis. En cette rentrée, il publie un livre au sujet brûlant d’actualité, "Sortir de la croissance : mode d’emploi" aux éditions Les Liens qui libèrent. Au fil des 203 pages, il tente d’identifier ce qui résiste dans le système économique et politique au traitement nécessaire des deux urgences du moment : le combat contre les inégalités et la lutte contre le changement climatique. Son enquête est claire : l’obsession de la croissance, la focalisation des politiques sur l’accroissement infini du PIB empêchent toute évolution sérieuse. Partout où est la nécessité de la croissance de cet indicateur fétiche et pourtant hautement discutable qu’est le PIB gît un obstacle, surgit une résistance au bien-être humain. Loin de l’image radieuse et positive de la croissance à laquelle les politiques et les économistes nous ont habitués, Éloi Laurent y voit un poison violent capable de détruire les solidarités, l’environnement, le bien-être, autrement dit la vie humaine.Il convient donc de toute urgence de se débarrasser de ce poison. Pour Éloi Laurent, Il n’est pas nécessaire d’en passer par une abolition du capitalisme qu’il rejette, mais par la mise en place d’un capitalisme régulé, débarrassé de son obsession comptable pour la croissance. Dès lors, le changement passe par une révolution des indicateurs. Il faut introduire de nouveaux critères sociaux et environnementaux à l’aune desquels seront jugées les politiques économiques. Pour relativiser la croissance et permettre d’en sortir, vous relativisez les modes de calcul de la croissance. À commencer par le PIB. Pourquoi ne représente-t-il pas un instrument de mesure de la prospérité et du bien-être ? Éloi Laurent : Il faut replacer les indicateurs dans le contexte historique qui leur a donné naissance. Pour le PIB, il y a deux moments fondamentaux. Le premier, c’est 1931, lorsque les membres du congrès des États-Unis demandent à Simon Kuznets, économiste à Harvard, de construire un indicateur pour mesurer les effets de la grande dépression. Ces derniers se rendent compte que la crise est alors un phénomène général, systémique. On ne l’appelle pas encore macroéconomique puisque la macroéconomie n’est pas encore inventée, elle le sera par Keynes en 1936. Mais cette macroéconomie est bien la première tentative de penser l’économie de façon globale. Les membres du Congrès formulent déjà cette demande : celle de mesurer une crise globale par un indicateur global. Kuznets construit donc un indicateur agrégé qui a montré que l’économie des États-Unis s’était bien effondrée, puis s’est redressée avec le New Deal. Ce premier épisode montre que le PIB n’est pas un indicateur de développement, mais que c’est un indicateur de crise. Du reste, dès 1934, Kuznets prévient que son PIB n’est pas un indicateur de bien-être. Et il ajoute qu’il faut, pour cela, mesurer les inégalités. Deuxième moment historique de la fondation du PIB, c’est la conférence de Bretton Woods en 1944. Keynes et ses équipes, qui participent à cette conférence, travaillent alors à l’amélioration de l’indicateur de Kuznets. Et c’est à cette conférence que l’on établit le PIB par habitant comme mesure commune de développement. C’est à ce moment-là que l’indicateur créé pour mesurer une crise devient un critère international de développement et un moyen de classer les nations. Mais dans les deux cas, ce n’est absolument pas le bien-être humain qui est l’élément central. Par ailleurs, parallèlement, le PIB devient de plus en plus important pour les politiques économiques à une époque où l’on connaît une forte croissance industrielle, où la crise écologique n’existe pas et où la question des inégalités est secondaire. Autrement dit, les trois sujets centraux du début du XXIe siècle sont très peu présents à ce moment et cela contribue au succès du PIB. Vous insistez sur l’utilisation détournée des travaux de l’inventeur du PIB, Simon Kuznets, et sur le rôle central que cela va avoir… Oui, Simon Kuznets, c’est l’homme des trois tours de passe-passe. Alors qu’il met en garde pour dire que la croissance du PIB n’est pas un indicateur de bien-être, on va lui faire dire que croissance et bien-être sont la même chose. Et encore aujourd’hui, lorsque vous discutez avec les responsables politiques, vous vous rendez compte que, pour eux, la croissance est le progrès social. Ils ne comprennent pas que la croissance du PIB est un indicateur limité. En 1955, Simon Kuznets publie un article qui introduit sa fameuse courbe en cloche entre le niveau du développement économique et le niveau des inégalités. Schématiquement, les inégalités augmentent au début du développement, puis se réduisent une fois un certain niveau atteint. La croissance serait alors la solution aux inégalités. Mais Kuznets n’a jamais dit cela : il a au contraire prévenu qu’il fallait, une fois le haut de la courbe atteint, des politiques de redistribution pour obtenir cette réduction des inégalités. Si ces politiques ne se mettent pas en place, le développement économique se poursuit, le PIB par habitant augmente, mais les inégalités stagnent. C’est le cas de la Chine aujourd’hui. Enfin, dans les années 1990, on va aller encore plus loin en utilisant sa courbe pour décrire les dégradations environnementales. Cette « courbe environnementale de Kuznets » construite par les économistes de la Banque mondiale prétend alors que les dégradations augmentent au début du processus de développement, puis, une fois un plateau atteint, plus on devient riche et moins on détruit l’environnement. Plus on est riche, plus on est « propre » parce qu’on mettrait en place des politiques de défense de l’environnement. C’est évidemment faux sur le plan empirique, mais cela va avoir une réelle force. Kuznets se retrouve donc au centre de trois idées extrêmement puissantes jusqu’à nos jours : la croissance, c’est le bien-être ; la croissance résout les inégalités et la croissance est la solution à la crise écologique. Ce que je démontre dans l’ouvrage, c’est que ces trois idées sont fausses : la croissance n’est pas le bien-être, la croissance ne résout pas la crise des inégalités qu’elle ne permet même pas de mesurer et la croissance ne résout pas la crise écologique."
VIZIONNAIR, le déploiement finalisé mi 2020
VIZIONNAIR, c'est le nom du projet du GRAND ANNECY de déployer 50 capteurs de qualité de l'air en complément de ceux d'ATMO installés à ANNECY même : 12 sont déjà installés à LA PUYA, THORENS-GLIERES, SEVRIER, DUINGT, VEYRIER, PRINGY, devant l'école VALLIN FIER à ANNECY, au SEMNOZ, etc.
La fiabilité de ces capteurs est maintenant validée comme en témoignent l'écart de mesure de NO2 sur celui du SEMNOZ à cause de la teneur plus élevée en O2 du fait de l'altitude au regard des capteurs des vallées et la conformité à la mesure de NOVEL en phase avec le résultat du capteur d'ATMO : il est essentiel de disposer de résultats indiscutables sur le plan scientifique. Nous avons franchi une première étape de validation.
La prochaine étape est d'accélérer le déploiement à compter de janvier 2020 pour mesurer l'état de la pollution d'hiver et d'été en milieu rural et péri urbain pour sensibiliser les habitants sur la question stratégique du chauffage au bois en période hivernale. Tant que les propriétaires de cheminées ouvertes ne seront pas persuadés qu'ils contribuent à la pollution en poussières fines, notre fonds air bois ne décollera pas suffisamment pour atteindre notre objectif de 3 000 cheminées équipées de dispositifs "flamme verte". Ces mesures devraient les convaincre dans l'Albanais à GRUFFY, HÉRY SUR ALBY ou ALBY et sur FILLIÈRES ou sur les rives du lac.
Les premiers résultats mettent l'accent sur l'impact des travaux de bâtiment ou de travaux publics - comme autour du chantier de déviation de PRINGY - qui vont nous conduire à développer des actions spécifiques de suivi des chantiers en lien avec BTP 74 pour la période estivale où la sécheresse rend les poussières des chantiers contributrices déterminantes de la qualité de l'air. Des capteurs seront à dédier à ce suivi avec une procédure d'alerte vers les responsables des chantiers. Ce sera une prochaine étape, maintenant que nous savons que ces capteurs développés par la start up "C NOTRE AIR" sont particulièrement fiables.
De sorte que dans la même commune, nous disposerons de capteurs l'un en proximité de l'axe routier et l'autre en zone plus éloignée sensible aux poussières des chauffages : la comparaison de leurs mesures permettra d'établir une discussion pédagogique avec les habitants.
Sans oublier les mesures à proximité des écoles pour sensibiliser les parents à la dangerosité de l'accompagnement des enfants en voiture.
Jusqu'à 1 kilomètre on pédale.
Au delà on prend le bus.
D'ici mi 2020, nous disposerons de l'application qui permettra au GRAND ANNECY de mettre ces données à la connaissance des habitants et des élus en référence aux seuils des recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) plus contraignantes que les normes de l'Union européenne.
Bon Noël !
Mes idées de cadeaux
Si vous manquez d’idée pour vos cadeaux sans créer de déchets ni concourir à l’obsolescence programmée, vous pouvez au choix offrir : une part sociale de la SOLAIRE DU LAC pour participer concrètement à la transition énergétique du GRAND ANNECY ; un abonnement au webjournal « LES JOURS » pour ses séries de reportages au long cours ou à l’hebdomadaire papier « 01 » pour une thématique traitée avec soin chaque semaine ou encore à « XXI » un trimestriel incroyable pour retrouver le plaisir de la lecture sur un temps long.
La CFDT et Macron, le choc des deux réformismes
Depuis 1983, le droit du travail a marqué ma vie. La CFDT a été mon syndicat pendant de longues années puis la cliente de mon cabinet d'avocats dès 1992 pour défendre le droit syndical. C'est dire si cette organisation me tient à coeur et combien la stratégie du gouvernement à son égard sur les retraites me surprend mais s'explique par des divergences de fond : "la CFDT prône surtout l’affirmation de la société civile face au politique, et l’autonomie des partenaires sociaux face à l’Etat. Il s’agit là de l’un des clivages majeurs dans les débats du moment entre le président et le syndicat." Voici une analyse fort pertinente de Guy GROUX dans LE MONDE. La CFDT et Macron, le choc des deux réformismes Avant d’entamer un nouveau cycle d’échanges avec les partenaires sociaux, le premier ministre, Edouard Philippe, a évoqué, dans son discours du mercredi 11 décembre sur le régime universel des retraites, la question de l’âge pivot, ne tenant ainsi aucun compte des exigences de la CFDT dont l’adhésion au principe de la réforme était pourtant quasiment acquise. Il ne s’agit pas d’un incident de parcours. Quelles qu’en soient les suites, cet épisode reflète les rapports ambigus tissés par l’exécutif, et surtout par Emmanuel Macron, avec la première organisation syndicale française. Certes, l’un et l’autre se veulent résolument réformistes, mais derrière les mots se cachent de profonds clivages quant au rôle des syndicats dans les mutations de la société française. Pour Emmanuel Macron, la place des syndicats, c’est d’abord dans l’entreprise (et au mieux, la gestion conventionnelle des professions). Le président de la République contredit ainsi ce qui constitue l’un des traits profonds voire historiques de l’identité de la CFDT. Certes pour celle-ci, l’entreprise est à l’évidence un lieu privilégié de l’action syndicale mais, dans le même temps, elle revendique un rôle beaucoup plus sociétal : elle se veut porteuse de propositions concernant l’ensemble de la société et des champs aussi divers que le modèle de développement économique, la création de solidarités qui dépassent les corporatismes d’hier, le partage du pouvoir dans l’entreprise. En mars, la CFDT a produit avec la Fondation Nicolas Hulot, la Fondation Abbé Pierre et ATD-Quart Monde, un manifeste qui exige de « changer de modèle de développement » et qui, face au réchauffement climatique, met la question sociale et écologique au cœur de la société. On retrouve ici le ton de la CFDT des années 1970, qui dénonçait déjà les « dégâts du progrès », l’idéologie productiviste et les risques liés à l’industrie nucléaire. Le soutien de la CFDT à la réforme actuelle des retraites fut a priori évident, et pour cause. Bien avant l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, elle revendiquait, lors d’un congrès tenu à Tours en 2010, la création d’un régime universel par points, à ses yeux plus équitable. On retrouve là le principe des « nouvelles solidarités » que la CFDT mit en avant dès les années 1980 dans une France touchée par des exclusions et des précarités sociales massives. Face à une protection sociale et une Assurance-maladie financées par les seuls revenus du travail, il s’agissait de faire appel à d’autres sources de revenus liés au capital ou au patrimoine, tout en brisant les séparations de statut entre secteurs privé et public, voire entre activités salariées ou non. Outre ses positions en faveur de retraites plus équitables, c’est dans ce cadre que se sont développées les luttes de la CFDT en faveur de la CSG, de la CMU ou du RMI. Installer un réel contre-pouvoir A l’heure où beaucoup estiment que la politique de Macron met en cause le paritarisme, la CFDT s’attache à avancer des revendications qui mettent en cause l’exercice traditionnel du pouvoir dans l’entreprise. Dès 1968, l’institution des sections syndicales d’entreprise (SSE) est due pour l’essentiel à une CFDT soucieuse d’installer un réel contre-pouvoir face au pouvoir patronal. En parallèle, le syndicat affirmait, non sans ambiguïtés d’ailleurs, une démarche autogestionnaire aux accents utopiques. Aujourd’hui, les revendications de pouvoir de la CFDT se font sur un mode beaucoup plus pragmatique : face aux actionnaires, il s’agit d’imposer dans les conseils d’administration une codétermination et de redéfinir les rapports de pouvoir entre travail et capital. Pour la CFDT, les représentants des salariés jouent un rôle-clé pour la prise en compte du capital humain dans les stratégies d’entreprise, mais aussi pour la pérennité de l’entreprise et donc de l’emploi, car n’étant pas « guidés par la recherche de l’intérêt à court terme [ces représentants permettent] un rééquilibrage de la gouvernance au profit des intérêts de long terme », selon un texte de 2017. C’est en ce sens qu’elle revendique désormais jusqu’à 30 % des sièges dans les CA des entreprises de plus de 1 000 salariés et 50 % dans celles de plus de 5 000. A ces enjeux écologiques, de solidarité, et de pouvoir dans l’entreprise, s’agrège enfin une conception particulière de l’organisation de la société. Depuis la fin des années 1970, la CFDT place la négociation collective et donc les relations contractuelles au cœur des régulations dans l’entreprise, mais aussi dans la société. Pour elle, il s’agit d’affirmer l’importance voire l’autonomie du contrat à l’égard du politique et de la loi. Un modèle de société qui, bien que n’ayant jamais été théorisé comme tel par la CFDT, peut être qualifié de « société contractuelle ». Certes, devant le Congrès réunissant députés et sénateurs à Versailles en juillet 2017, Emmanuel Macron a évoqué l’institution d’un nouveau modèle politique, une « République contractuelle ». Mais ces propos masquent mal les divergences de fond avec la centrale de Belleville. Le président propose une conception hybride, celle d’un libéralisme à la fois économique et culturel, mais toujours soumis à une vision quasiment gaullienne de l’autorité de l’Etat sur les intérêts particuliers, dont ceux représentés par les syndicats. Ce « réformisme d’Etat » affirmé avec force s’oppose au réformisme qui est à la source de la culture politique, historique et sociale de la CFDT, que beaucoup rapportent au modèle social-démocrate et syndical d’Europe du Nord. Mais la comparaison est trompeuse au moins sur un point. Le modèle social-démocrate européen implique souvent des liens puissants entre syndicats et partis socialistes, ou des rapports privilégiés entre Etat, groupes de pression et syndicats. Sans nier l’importance et la nécessité de la loi, la CFDT prône surtout l’affirmation de la société civile face au politique, et l’autonomie des partenaires sociaux face à l’Etat. Il s’agit là de l’un des clivages majeurs dans les débats du moment entre le président et le syndicat. Guy Groux est sociologue, Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof)